Extrait du livre Nature & Ayurveda, publié aux Éditions de l’Homme
Nous ne sommes pas si différents de l’ensemble de la création : étoiles, nuages, forêts, océans, animaux (incluant l’être humain), plantes, abeilles et vers de terre, tout dans l’univers est composé des mêmes éléments. Nous sommes tous faits de la même poussière d’étoiles.
– Hubert Reeves
Observer la nature en hiver est un cadeau. Cette saison unique est le temps où la terre entre en dormance. Naturellement, la semence de plante est en attente, garde son énergie jusqu’à ce que le feu, le soleil printanier, revienne raviver l’ensemble de l’oeuvre.
L’ayurvéda, cette grande sagesse ancestrale, nous rappelle que nous sommes faits des mêmes éléments que l’ensemble de la création (espace, air, feu, eau et terre). De plus, nous portons la même sagesse que toutes les lois qui gouvernent la nature. Ce qui n’est pas rien! Nous semblons pourtant oublier que nous sommes liés et influencés par le cycle des saisons, et prendre le temps d’observer ce qui est en ce moment est plus que précieux, car cela nous donne des indications importantes sur ce que nous avons besoin de faire pour nous maintenir en équilibre. Art de vivre adapté aux saisons, l’ayurvéda est extrêmement pertinent de nos jours, car il nous donne des clés importantes à inclure dans nos rituels bien-être afin que nous puissions créer et maintenir l’équilibre tête-coeur-corps-esprit.
L’hiver est également associé en grande partie au dosha Kapha, composé des éléments eau et terre. C’est un moment de l’année où nous sommes probablement plus portés à rester à l’intérieur, à être un peu plus en état d’introspection et à nous envelopper d’une doudou au coin du feu. Ceci dit, il est important de garder en tête que nous avons aussi besoin d’activer la circulation, l’élimination et surtout, d’éviter la stagnation. La nature a horreur de la stagnation. Lorsque la circulation manque, l’eau se corrompt. Pensez à un lac stagnant : qui aurait envie de venir passer l’été dans un chalet au bord de ce lac?
Dosha Kapha : élément eau et terre
À l’opposé des doshas Vata et Pitta, qui ont besoin d’être apaisés, Kapha, lui, a besoin d’être activé. Lorsqu’il y a une suraccumulation des éléments eau et terre, tout est lent et lourd; la léthargie et le manque d’énergie s’installent. Il faut donc bouger et activer le métabolisme, même si le désir sous-jacent est à l’opposé. Pour quelqu’un présentant un déséquilibre de Kapha, le défi est de se mettre en action.
Il n’y a pas de recette magique, sauf de créer un rituel matinal, et de le mettre en pratique, jour après jour.
Rituel matinal de régénération en deux étapes
Première étape : le brossage corporel à sec
Le brossage à sec avant la douche permet de stimuler la circulation, d’activer l’élimination des cellules mortes et de préparer la peau à recevoir l’huile en automassage à la deuxième étape.
Matériel
Une brosse aux poils naturels (et non pas synthétiques), en vente dans les pharmacies et les magasins d’aliments naturels, ou un gant exfoliant.
Technique
- Avant d’entrer sous la douche, directement sur la peau nue, commencez à brosser la peau délicatement avec des mouvements de bas en haut dirigés vers le coeur. Ajustez la pression selon votre degré de confort. Commencez par les pieds, puis passez aux jambes, en effectuant toujours le mouvement du bas vers le haut, en direction du coeur.
- Précaution : allez-y délicatement au niveau de la poitrine, la peau des seins étant plus sensible.
- Une fois tout le corps brossé, prenez votre douche comme d’habitude.
Deuxième étape : l’automassage vigoureux à l’huile herbale tonifiante
À la sortie de la douche ou du bain, alors que le corps est encore enduit d’eau et que les pores de la peau sont ouverts, versez dans la paume de votre main une petite quantité d’huile herbale infusée aux herbes tonifiantes (pour stimuler Kapha) ou une huile végétale simple biologique, et massez chacun des bras, en prenant soin de bien hydrater/masser les biceps et d’activer la circulation.
Prêtez attention aux zones plus sensibles.
Attardez-vous à l’arrière des bras (vers la quarantaine, la peau a tendance à être un peu plus flasque à cet endroit, ce que j’aime appeler affectueusement le « gras de bye bye ! » à cause du mouvement de la main qui le dévoile au grand jour). Une combinaison de mouvements simples et d’hydratation profonde avec l’huile nourrira cette partie du corps, qui a parfois besoin d’un peu plus de soins.
Avec des mouvements vigoureux pour activer la circulation, prenez le temps de masser cette partie du corps de façon consciente.
Reprenez une petite quantité d’huile au besoin et massez sous les aisselles, endroit stratégique où il faut éviter la stagnation. En levant le bras, faites des mouvements vers le coeur. La poitrine et les aisselles ainsi que la base du cou contiennent un circuit de ganglions lymphatiques importants qui font un travail remarquable de filtration.
Massez ensuite les seins, la poitrine et le ventre.
Terminez en massant les jambes, les cuisses et les fesses. Il n’est pas nécessaire de rincer le corps par la suite. Si vous utilisez une huile herbale infusée de plantes, elle sera absorbée rapidement. Vous pouvez éponger ce qui reste d’eau et enfiler un vieux peignoir. Environ 10 minutes plus tard, la peau aura absorbé l’huile restante et vous pourrez vous habiller sans risquer de tacher vos vêtements.
Activer le métabolisme avec des plantes stimulant la digestion
Une autre façon d’activer l’ensemble de l’oeuvre est de stimuler la digestion. Selon l’ayurvéda, l’agni est le centre de la transformation, la « fournaise » du système digestif qui, lorsqu’à son plein potentiel, permet d’assimiler ce dont nous avons besoin et d’éliminer TOUT ce qui ne nous sert plus.
La digestion ne se limite pas à ce que nous portons à notre bouche, mais plutôt à une prise de conscience de l’importance de chacune des étapes menant à une nutrition nourrissante et vivante. Le même repas peut être assimilé différemment, car plusieurs facteurs influencent son assimilation : le choix des ingrédients, la façon dont le repas est apprêté, avec qui nous le partageons, quels sentiments nous habitent et quelle énergie et stimulis nous accompagnent lorsque nous prenons notre repas, etc.
Une digestion lente, non optimale, mène à l’accumulation d’ama (ou résidus d’une digestion incomplète). Au fil du temps, il peut y avoir suraccumulation de résidus non digérés et cela peut mener à plusieurs déséquilibres sur les plans physique et mental.
12 signes que votre agni a besoin d’un petit coup de pouce (signes de l’accumulation d’ama)
- Mauvaise haleine;
- Langue recouverte de résidus blanchâtres au réveil;
- Présence de mucus (sécrétions) dans le nez et la gorge au réveil;
- Peu d’appétit le matin;
- Difficulté à digérer et à éliminer;
- Manque de vitalité ou d’énergie;
- Douleurs aux articulations;
- Inconforts ou douleurs généralisés;
- Fatigue ou léthargie;
- Dépression;
- Fragilité aux infections;
- Difficulté à manifester ses intentions.
Comment stimuler son feu digestif
Nous prenons souvent pour acquis que la digestion se fera de façon naturelle. Et pourtant, y porter attention permet d’optimiser le processus d’extraction et d’élimination. De façon générale, voici quelques conseils pour prendre soin de votre feu digestif :
- Évitez de surcharger votre estomac. Rappelez-vous la règle du 1/3 :
- 1/3 de nourriture solide,
- 1/3 de liquide,
- 1/3 d’espace pour la digestion mécanique (brassage);
- Prenez une infusion de gingembre râpé ou de fenouil environ 30 minutes avant le repas pour stimuler le feu digestif;
- Évitez de surstimuler vos sens. Créez un espace zen vous incitant à vous ancrer dans le moment présent et à profiter du repas;
- Une musique calme permet de manger plus lentement, plus doucement. Observez les différentes textures et explosions de goûts en bouche lorsque vous prenez le temps de mastiquer. N’oubliez pas que la digestion débute dans la bouche et que cette étape est cruciale pour faciliter par la suite la décomposition, l’extraction et l’élimination;
- Ajoutez des épices comme le gingembre, le cumin, les graines de coriandre, le persil et la cardamome à vos repas et à vos tisanes;
- Évitez de boire des liquides contenant de la glace, qui réduit le feu digestif.
Rituel matinal de préparation d’une eau digestive
Pour stimuler le feu digestif, j’aime bien préparer le matin une infusion de plantes et d’épices que j’ai nommée il y a quelques années « eau digestive ».
Le principe est simple : faire infuser un mélange d’épices dans de l’eau et la consommer durant la journée. L’eau digestive qui reste à la fin de la journée peut servir de base pour cuisiner un bouillon, une soupe ou un potage, par exemple.
Non seulement les plantes et les épices choisies rendent cette boisson très goûteuse, mais elles soutiennent la digestion dans son ensemble. L’odeur des épices qui infusent réchauffe le coeur, embaume la pièce et induit un état de félicité, particulièrement durant la saison froide.
Je me fais souvent demander quelle est LA recette d’eau digestive et ma réponse est la suivante : il n’y a pas de recette ultime. Fiez-vous à votre intuition, à votre inspiration; découvrez les saveurs et les combinaisons que vous aimez et qui vous donneront envie de partager la bonne nouvelle. Vous pouvez choisir les plantes selon ce qu’il y a de disponible dans le jardin, le réfrigérateur ou l’armoire, au gré des saisons.
Voici une liste de plantes ayant, entre autres, le pouvoir de stimuler le feu digestif et dont j’aime me servir : anis étoilé;basilic, cannelle, cardamome, citron et citron vert, coriandre (fraîche ou graines), cumin, curcuma (racine fraîche), fenouil, fenugrec, gingembre (racine fraîche), menthe, persil (plat et frisé), poivre long, poivre noir, romarin, thym.
Ces épices ont bien sûr de multiples propriétés. Le mélange cardamome-coriandre-cumin-fenouil-gingembre a été particulièrement étudié et a démontré, entre autres, les effets suivants :
- réduction de l’inflammation;
- diminution des ballonnements et des flatulences;
- normalisation de la glycémie par la stimulation de la production d’insuline;
- stimulation de la production de bile favorisant ainsi la digestion des graisses.
Préparation
Dans une grande casserole, à feu moyen, faire chauffer environ 4 litres (16 tasses) d’eau jusqu’à ce qu’elle frémisse. Ajouter les écorces, les racines et les graines de son choix. Couvrir et laisser infuser pendant environ 10 minutes. Il est important de ne pas faire bouillir à grands bouillons, mais plutôt de laisser doucement infuser. Retirer du feu, attendre environ 2 minutes et ajouter, si désiré, des herbes fraîches (basilic, persil, coriandre, feuilles de pissenlit, etc.). Laisser infuser environ 10 minutes. Filtrer l’eau à l’aide d’un tamis ou bien la verser directement, avec les plantes, dans un contenant en verre.
En résumé, l’hiver est un temps pour osciller entre le désir de se déposer et l’importance d’activer l’ensemble de l’oeuvre. Prenons le temps de bouger, danser, nous masser tout en nous rappelant à quel point nous sommes privilégiés d’être en vie à chaque matin où nous ouvrons les yeux.
Santé, la vie!