Cet article est rédigé par Mélanie Fortier – Ouikid et est tiré du volume 003 de l’édition papier d’Infuse magazine : « Se reconnecter et adapter sa parentalité », que vous pouvez vous procurer sur notre boutique en ligne.

Avant l’âge scolaire, les crises (ou tempêtes d’émotions, comme je les surnomme) risquent d’être fréquentes, et c’est tout à fait normal. Comme parents, on veut évidemment être bien outillés pour accompagner nos enfants dans la gestion de leurs grosses émotions. On souhaite leur fournir tout ce dont ils ont besoin pour développer leur intelligence émotionnelle et être en mesure de gérer leurs grosses émotions de façon autonome. Alors, on se questionne : « Comment puis-je enseigner à mes enfants la régulation des émotions? » Il y a tant à faire et à dire que je pourrais écrire 20 ouvrages sur le sujet, mais voici ce que j’ai envie de vous transmettre ici aujourd’hui.
Les limites cognitives de l’enfant
Avant tout, il faut comprendre une chose bien importante : l’enfant a de grandes limites cognitives dues à l’immaturité de son cerveau. Parfois trop vite oubliées, ces limites ont un rôle majeur sur la façon dont un enfant arrive (ou n’arrive pas) à réguler ses émotions. L’enfant qui réagit fortement, spontanément, impulsivement et sans filtre devant le refus de son parent d’acheter un Kinder Surprise à la caisse de l’épicerie, l’enfant qui réagit fortement en tapant l’ami qui vient de lui « emprunter » sa poupée préférée qui traînait dans le fond du bac à jouets, l’enfant qui hurle comme pas possible parce que son bol de céréales n’est pas rose.
Avant l’âge scolaire, plusieurs éléments nuisent à la capacité de l’enfant de bien réguler de façon autonome ses émotions. Même si on lui fait les meilleurs apprentissages au monde, il n’a pas le langage aussi développé qu’un enfant d’âge scolaire, il n’a pas encore acquis la décentration (seul son point de vue est valable) et il ne peut traiter qu’une seule information ou émotion à la fois (donc, il ne peut être disponible aux apprentissages pendant qu’il vit une grosse émotion).
Certaines parties de son cerveau servant à raisonner ou à trouver des solutions ne sont tout simplement pas accessibles lorsqu’il vit une grosse émotion, un peu comme une porte d’urgence qui se referme automatiquement. Tous ces éléments (et beaucoup plus encore) font en sorte que c’est un gros défi pour les enfants d’arriver à réguler de façon autonome leurs émotions et qu’ils n’y arriveront probablement pas très bien avant l’âge scolaire.
Toutefois, les parents peuvent faire une réelle différence dans le développement de l’intelligence émotionnelle de leurs enfants. Vous avez un outil super puissant que vous n’utilisez peut-être pas à son plein potentiel : vous.
Accompagner notre enfant au meilleur de soi
Ce n’est un secret pour personne, les enfants sont des éponges qui apprennent beaucoup par imitation. Ils reprennent ainsi votre façon de parler, de bouger et, évidemment, votre façon de réagir devant une frustration, votre façon de gérer l’impatience, votre façon de communiquer à l’autre votre déception ou vos besoins. Et tous ces gestes, actions ou paroles sont des enseignements implicites que votre enfant reçoit. « Si mon parent le fait, c’est ce que je dois faire aussi! »
L’une des premières étapes, qui aura des effets positifs pour toute la famille, c’est de prendre un moment pour s’observer. « Comment est-ce que je réagis devant la frustration? Comment est-ce que je peux modifier ma réaction pour enseigner ce que je souhaite à mon enfant? Qu’est-ce que je fais lorsque je me sens impatient? Quels outils puis-je avoir ou quelles actions puis-je poser pour mieux gérer mon impatience et pour offrir ce modèle d’enseignement implicite à mes enfants? »
Gardez toujours en tête que vous êtes le modèle, vous êtes le héros, vous êtes le Dumbledore de votre famille de Moldus. Les petits apprennent de vous avec beaucoup d’émerveillement et d’attention, et on serait fou de ne pas en prendre avantage.
Alors, verbalisez vos actions, votre ressenti. « Ouf! Je me sens vraiment en colère d’avoir brûlé le souper! Je vais prendre un moment pour me calmer. » Et on consulte notre liste mentale de stratégies pour se calmer : boire un grand verre d’eau, prendre une courte marche, mettre notre chanson préférée et danser, écouter une méditation guidée rapide, prendre dix grandes respirations, écouter et nommer trois sons que l’on entend, etc. Ce sont toutes des stratégies qui sont efficaces, valables, accessibles et réalisables pour nous comme pour les enfants. On peut alors leur expliquer en faisant référence à l’expérience tangible à laquelle ils viennent d’assister : « Tu sais, j’étais fâché d’avoir brûlé le souper. J’avais une grosse boule de colère dans mon ventre. Puis, j’ai fermé mes yeux et j’ai écouté trois sons. J’ai entendu la tondeuse du voisin, papa qui parle au téléphone et la musique de la radio. Ça m’a permis de me calmer et de trouver une solution pour le souper. Maintenant, je me sens mieux! » C’est bien la preuve que souvent, les actions parlent plus fort que les mots.