On l’a tou.te.s en tête, la scène classique d’une consultation : deux fauteuils, un bureau, un.e professionnel.le assis.e face à soi. Ça a l’air sérieux, les silences semblent pesants, et il devient difficile de savoir quoi faire de ses mains.
Et si consulter ne voulait pas toujours dire rester assis.e entre quatre murs?
Et si avancer, c’était aussi marcher?
La thérapie par la marche (ou walk and talk therapy) gagne tranquillement sa place parmi les approches reconnues. Et non, ce n’est pas une tendance bien-être passagère. C’est une modalité d’intervention fondée sur la relation, le mouvement et la connexion à la nature— et de plus en plus utilisée ici comme ailleurs.
Une approche qui fait avancer… dans tous les sens du terme
Marcher pour consulter peut sembler surprenant. Et pourtant, quand on y pense, ça fait tellement de sens.
Cette modalité repose sur une idée simple : remplacer le cadre traditionnel du bureau par une marche à l’extérieur, en compagnie d’un.e professionnel.le.
Le cadre change, oui. Mais ce qui compte reste : une présence, une écoute, un espace pour déposer ce qui pèse.
Sauf que cette fois, cela se passe en mouvement.
Selon une revue scientifique récente (Wiley, 2022), cette approche permet notamment :
- d’augmenter la spontanéité et l’authenticité des échanges ;
- de réduire les symptômes liés à l’anxiété ou à la dépression ;
- d’apaiser le système nerveux grâce à l’activité physique ;
- et de renforcer le lien thérapeutique en diminuant le poids du face-à-face.
Bref, on ne marche pas pour éviter les enjeux. On marche pour y accéder autrement.
Et concrètement, ça ressemble à quoi?
Chaque professionnel.le structure cette approche à sa manière, mais dans l’ensemble :
- Les rencontres se font à l’extérieur, souvent dans un parc, un sentier, une piste cyclable ou un quartier calme ;
- On marche côte à côte, à un rythme adapté à la personne qui consulte ;
- Le contenu des séances reste le même : les enjeux importants sont abordés, les émotions explorées. On avance — au sens propre comme au figuré.
Certaines personnes font toutes leurs rencontres de cette façon. D’autres alternent avec des séances en bureau ou à distance. Il n’y a pas de recette unique.
À qui ça peut convenir?
À beaucoup de monde, en fait. Mais certain.e.s y trouvent un bénéfice encore plus grand :
Les personnes vivant avec de l’anxiété ou une surcharge mentale :
Le mouvement soutenu et le fait d’être à l’extérieur peuvent contribuer à apaiser le système nerveux, réduire les ruminations et offrir un espace perçu comme moins oppressant que le cadre classique.
Celles qui éprouvent de la gêne dans les échanges en face-à-face :
La posture côte à côte diminue l’intensité du regard, facilite l’accès à la parole et réduit la sensation d’être observé.e.
Les personnes en période dépressive :
Sortir, activer le corps en douceur et s’exposer à la lumière du jour sont autant de gestes simples qui peuvent soutenir l’humeur et favoriser une forme de mise en mouvement — au sens propre comme au figuré.
Les personnes ayant un fonctionnement neurodivergent (ex. : TDA/H) :
Le besoin de mouvement peut être mieux respecté dans ce type de modalité, qui permet de penser et de parler en bougeant, sans se contraindre à rester en place.
Et bien sûr, il y a aussi celles qui apprécient tout simplement cette façon d’entrer en contact avec soi, avec l’autre et avec l’environnement. Parce que oui, la nature participe aussi.
Est-ce que c’est pour tout le monde?
Pas forcément. Il y a des limites à considérer :
– La confidentialité dans un espace public
Même en marchant dans des coins tranquilles, il reste une possibilité que quelqu’un entende un extrait de la conversation. Le.a professionnel.le fera tout ce qu’iel peut pour minimiser ce risque, et une discussion aura lieu avant la rencontre pour convenir de ce qui rend la démarche confortable. Il est toujours possible de revenir au bureau en tout temps.
– Les capacités physiques
Certaines conditions de santé peuvent rendre la marche difficile ou moins agréable. Une évaluation est souvent faite pour déterminer si cette modalité est adaptée.
– La météo
Au Québec, c’est un classique. Il faut parfois s’ajuster, reporter ou modifier le plan. On appelle ça… de l’adaptabilité.
Et au-delà de l’efficacité?
La recherche indique que ce cadre moins conventionnel est souvent perçu comme plus accessible émotionnellement. Plusieurs études rapportent que les personnes qui consultent s’y sentent moins figé.e.s, moins observé.e.s, et plus libres d’être elles-mêmes.
La façon dont la démarche est vécue change : avec un sentiment de liberté accrue, une parole plus fluide et une présence à soi qui se construit autrement. La posture physique et l’environnement deviennent des leviers thérapeutiques à part entière.
Il y a aussi quelque chose de symbolique à marcher côte à côte avec quelqu’un. Une posture qui dit : je suis là avec toi, sans te devancer, sans te tirer. On avance ensemble. À ton rythme.
Ce n’est pas anodin dans une société où la performance, même dans la souffrance, reste souvent valorisée.
En conclusion
La thérapie par la marche n’est pas une solution miracle. Elle ne remplace pas toutes les autres approches. Mais elle représente une option précieuse, surtout lorsque le corps a autant besoin d’air que l’esprit.
Cette modalité est offerte à la clinique Autrement, dans la région de Thetford Mines. Cela dit, il est tout à fait possible de la découvrir ailleurs : plusieurs professionnel.le.s en santé mentale à travers le Québec l’intègrent à leur pratique.
