Un article d’Aurélie Butzig, psychologue chez Meetual.
« Je suis naturellement imparfait, limité et digne d’être aimé. L’autre aussi » – Delisle, 2004.
Quand on parle de l’amour de soi, on pense inéluctablement à Narcisse, personnage de la mythologie grecque extrêmement beau et fier. C’est en voyant son reflet dans une source que celui-ci se fascine par sa propre beauté. Il en oublie même de boire et de manger. Prenant racine au bord de l’étang, il dépérit peu à peu et finit par en mourir. Il est dit qu’à cet endroit a poussé la fleur qui porte son nom et qui, depuis, se reflète dans l’eau à la belle saison, pour dépérir à l’été.
C’est de ce mythe que vient le mot narcissique. Ce dernier définit une personne peu empathique qui a tendance à se positionner de manière supérieure par rapport aux autres.
Mais développer l’amour de soi ne signifie pas être narcissique, bien au contraire.
Le narcissisme sain
A contrario, les carences de narcissisme, c’est-à-dire ne pas avoir assez d’amour de soi, peuvent provoquer un sentiment de mal-être récurrent, la peur constante de déplaire, l’incapacité à se respecter soi-même dans ses valeurs, la difficulté à prendre position ou à dire non.
Cependant, il est possible de développer un narcissisme sain. Effectivement, cultiver une saine représentation de soi c’est s’accepter dans sa parfaite imperfection et accepter l’autre de la même façon. L’amour de soi ou le narcissisme sain est ce qui nous permet d’apprécier la personne que l’on est.
Nous n’avons pas besoin d’être une personne exceptionnelle pour sentir de l’amour pour nous-mêmes, au contraire. S’aimer soi-même, c’est être capable d’éprouver un sentiment de bien-être et de la satisfaction envers soi dans notre quotidien.
Aujourd’hui, nous vivons dans une société dans laquelle le message véhiculé est qu’il faudrait constamment être parfait dans tous les domaines de notre vie. Comme si la valorisation ne pouvait venir que du dépassement de soi. Ces exigences constantes peuvent avoir un impact sur l’estime de soi.
Non, s’aimer soi-même, c’est tout simplement s’estimer en tant que personne, se respecter et se faire respecter.
Interpréter ce qu’est l’amour de soi
L’amour de soi se développe depuis notre naissance à travers des relations stables et empathiques. Les parents et l’entourage, grâce à des réponses adéquates aux besoins de leurs enfants, vont permettre l’apaisement et le développement d’une représentation juste d’eux-mêmes.
Une représentation juste de soi, c’est une compréhension de ses propres capacités et limites personnelle tout en maintenant un sentiment de dignité et de légitimité. Effectivement, c’est cette contenance de nos parents, et de notre entourage, qui va nous permettre d’affronter les frustrations normales de la vie quotidienne et d’être capable de supporter les blessures narcissiques, c’est-à-dire le fait ne pas être omnipotent, tout puissant et d’avoir parfois des échecs.
L’amour de soi est une base dans notre vie qui va nous permettre de faire des projets et de penser qu’on est en mesure de les réaliser, c’est notre capacité de mobiliser notre énergie dans l’atteinte d’objectifs réalistes.
De façon tout aussi fondamentale, le développement d’un narcissisme sain passe par la reconnaissance des besoins et des limites de l’autre.
L’amour de soi va donc permettre aussi de développer des relations saines avec notre entourage, basées sur la mutualité et l’équilibre relationnel. Il va influencer notre capacité à être avec les autres, à vivre avec eux ; mais aussi à les aimer. C’est être en mesure d’avoir un intérêt authentique pour l’autre. Autrement dit, si je ne suis pas en mesure de me respecter, de m’estimer et de m’accepter moi-même, ma relation aux autres va être teintée de ma relation à moi-même.
En somme, au sein d’une relation les sentiments de rejet, d’abandon et de manque de reconnaissance, peuvent être importants à considérer comme des indicateurs d’un manque d’amour de soi. Effectivement, le manque d’amour de soi peut avoir pour effet d’entraîner une dépendance affective, développant ainsi le besoin de valorisation constante au travers du regard des autres. C’est pourquoi la peur du jugement est souvent présente dans ce cas.
Mais, que pouvons-nous mettre en place pour développer l’amour de soi?
Voici 3 trucs à essayer :
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Développer l’autocompassion
Par exemple, lorsque nous vivons une situation difficile ou que nous faisons une erreur au travail, nous avons tendance à nous juger très durement. Notre discours intérieur est souvent humiliant. Mais lorsqu’une personne qui nous est chère nous expose le même type de difficulté, nous sommes bien plus compréhensifs… Faire preuve d’auto-compassion, c’est avoir autant de bienveillance et d’empathie envers soi-même qu’envers cette personne que l’on tente de consoler.
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Écouter nos propres besoins
Il est important de prendre en compte ses besoins et d’être capable de les satisfaire même s’il faut pour cela apprendre à dire non. S’oublier soi-même ne permet jamais de satisfaire les autres !
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Être fier de nous et avoir la gratitude pour soi-même
À chaque fin de journée, demandez-vous quel a été votre « bon coup »… Et dites-vous qu’aucune journée n’a pas au moins un « bon coup », le plus petit soit-il ! Donnez en premier à vous-même, ceci vous donnera de l’énergie pour donner aux autres.
L’amour de soi n’est pas une mince affaire dans la mesure où c’est ce qui constitue la base de notre relation à nous-mêmes, de nos relations aux autres, mais aussi de notre capacité à développer et mener à bien tous nos projets de vie. En somme, il est essentiel de prendre soin de nous-mêmes et de nous recentrer afin de pouvoir nous ouvrir aux autres et au monde.