Cet article a été rédigé par Laurie Michel, fondatrice de Vivala.

Vos tâches vous semblent épuisantes avant même de les avoir commencées ? Vous sentez une pression sur vos épaules dès le matin, rien qu’en imaginant le flot de messages qui vous attend ?
Dans nos environnements de travail ultra-connectés, une charge invisible s’est installée : celle d’un effort mental constant, dicté à la fois par les fonctionnalités de nos appareils numériques et par notre manière, pas toujours idéale, de les utiliser.
Aujourd’hui, je vous propose de plonger dans trois facteurs clés de cette charge invisible… et de voir comment la réduire.
Le bruit de nos appareils numériques
Combien de courriels recevez-vous chaque jour ? Avez-vous activé les notifications sur votre ordinateur et votre téléphone ? Ces alertes, qu’elles sonnent ou vibrent, agissent directement sur votre corps. Lorsqu’une notification arrive, elle déclenche un état d’alerte dans le cerveau, peu importe sa nature.
Nous oublions parfois que notre cerveau a été conçu pour survivre dans un monde sans technologie. Il n’est pas adapté à nos outils modernes, qui créent un état d’hypervigilance constant, très préjudiciable pour notre santé.
Vous pensez être protégé en supprimant toutes les notifications ? C’est une fausse bonne idée souvent proposée pour résoudre tous les problèmes liés au numérique, du stress à la difficulté de déconnecter. Mais c’est une illusion : les notifications ne sont pas seules responsables du bruit technologique, et les retirer complètement peut même augmenter votre stress et votre FOMO, cette peur de manquer quelque chose qui touche plus de 55 % des utilisateurs*.
Supprimer les notifications non humaines reste essentiel. Pour les autres, privilégiez des pauses ponctuelles ou des horaires précis de réception plutôt qu’un retrait total.
Le bruit technologique est aussi visuel. Que se passe-t-il lorsque vous ouvrez votre boîte de réception et que votre cerveau analyse les 25 nouveaux messages ? C’est encore du bruit. Et le problème est qu’on ne consulte pas nos messages une ou deux fois par jour, mais en continu : 70 % des courriels sont ouverts dans les 6 secondes suivant leur réception. Autrement dit, une grande partie des utilisateurs travaille avec leurs courriels constamment à portée de vue.
Et les courriels ne sont pas les seuls générateurs de bruit! Le clavardage peut être un vrai fléau. Il impose une pression de réponse rapide et peut provoquer un sentiment de culpabilité lorsqu’on fait une pause, notamment en télétravail.
Les interruptions
Internet est accessible en quelques secondes, et les distractions numériques sont désormais au cœur de nos journées de travail. Que ce soient les applications de communication ou les réseaux sociaux, créer des moments de concentration devient de plus en plus difficile face à des outils qui offrent de la dopamine artificielle sans effort.
Je me souviens de journées ou j’étais épuisée, vidée. Pourquoi? Mes méthodes de travail : multitâche, interruptions que je déclenchais moi-même et alertes intempestives que je subissais avec fatalisme à toutes les heures.
Ce que je ne savais alors c’est que ces distractions numériques ne volent pas seulement du temps, elles nous épuisent. Le cerveau doit se projeter pour gérer chaque nouvelle situation. Lorsque l’on ouvre ses messages en pleine tâche importante, il commence à énumérer des options, solutions, possibilités… autrement dit, il se détache complètement de la tâche en cours. Si cela se répète sur plusieurs applications en simultané, on comprend facilement l’épuisement déclenché.
Un enjeu supplémentaire apparaît : une interruption initiée par soi-même n’est pas vécue de la même façon qu’une interruption subie d’après les chercheurs. Elle ne crée pas forcément de frustration, puisque l’arrêt de concentration a été volontaire. Cette habitude peut donc s’installer sans que l’on réalise son impact : on croit la maîtriser, alors qu’elle interfère avec la productivité et la gestion des priorités. Une telle interruption, au-delà du temps nécessaire pour retrouver la concentration (entre 1 et 23 minutes selon certaines études), peut aussi influencer l’humeur de la journée selon le contenu consommé.
Une hyperdisponibilité implicite (attendue ou requise)
L’arrivée de l’instantanéité des communications a bouleversé notre rapport à la vitesse et à l’attente. Cette accessibilité constante pèse sur notre capacité d’attention, de concentration, mais aussi sur notre vision de la pause mentale.
J’ai fait partie de ces utilisatrices qui se valorisaient par leur disponibilité permanente. Je ne faisais aucune distinction de temps, d’heures ou d’interlocuteurs. Tout le monde savait que j’étais la personne la plus joignable du monde : c’était devenu mon slogan personnel, et je me suis brûlée les ailes en frôlant le burnout. Je confondais accessibilité et disponibilité, comme beaucoup aujourd’hui.
L’accessibilité est une fonctionnalité de nos appareils comme la notification. Je vous invite à relire la phrase précédente. Et encore une fois. L’accessibilité n’est pas une obligation. La disponibilité est un choix qu’on fait, une décision qu’on prend, une limite que l’on fixe pour prendre soin de soi. Ce n’est pas parce que les appareils numériques nous permettent d’être accessibles qu’on doit être disponible! J’ai mis du temps à le comprendre car ce n’est pas toujours facile, nous subissons des attentes et une pression venant des autres.
Ces attentes sont devenues irréalistes et poussent à une présence numérique constante, perçue comme gage de confiance ou de professionnalisme. Il a été bon pour moi de me rappeler que je n’étais pas un service 24/7! Je n’étais pas un robot… Et j’espère qu’en lisant ces lignes, cela vous aidera également à revoir les promesses que vous faites et à étudier leurs conséquences.
La vitesse du numérique est inhumaine, et plutôt que de vouloir l’égaler, il faut la dénoncer et créer des règles qui respectent nos corps et nos esprits.
Comment se protéger?
Cette stimulation cognitive constante a un coût : stress, anxiété, fatigue mentale, épuisement. Elle a été récemment citée dans une étude comme une nouvelle forme d’intensification du travail, où la charge excessive ne dépend plus seulement de la quantité de tâches, mais aussi de l’environnement numérique et des méthodes de travail.
Peut-être que, comme moi à une époque, vous sentez un découragement vous gagner face à ce poids mental du numérique. Je me souviens de ma tête lourde, épuisée, comme si je ne pouvais jamais être tranquille, légère, sereine. J’entends encore ma petite voix parler de fatalité face à l’hyperstimulation numérique, comme si je ne pouvais pas faire autrement.
Voici ce que j’aurai aimé qu’on me dise :
- Clarifier ses limites n’est pas un signe de faiblesse mais une force
- La concentration est plus importante que la »présence » en ligne
- Il existe d’autres façons de montrer son engagement qu’en sacrifiant son bien-être
- Tu n’as qu’un seul cerveau, personne d’autre que toi ne peut le protéger
Et j’aurai aimé faire ces actions plus tôt :
- Observer mes habitudes numériques pour identifier les gestes en ligne qui nuisent à ma productivité, à ma santé et mon bien-être global afin d’agir
- Faire les réglages nécessaires sur les appareils numériques pour créer un environnement numérique sain dont une régulation des notifications, des heures sans communications
- Déconnecter du numérique tous les jours pour plusieurs heures pour laisser mon cerveau se reposer
- Travailler dans un environnement de travail qui soutient ma santé et bien-être car c’est la clé de la performance
- Valoriser ma qualité de présence au lieu de ma réactivité sur le web
*Selon une étude terrain réalisée par Vivala en juin 2024 auprès de 183 employés dans une dizaine d’organisations.